Il y a, dans le parcours de Rama Likibi, une ligne de crête qui relie la patience des artisans et l’obstination des bâtisseurs.
Pendant plus d’une décennie, il dirige une maison d’édition, apprend le poids exact des mots, la respiration d’un texte, la justesse d’une voix. Quelques réussites marquantes jalonnent ces années et, avec elles, la conviction que l’édition n’est pas seulement un métier : c’est une manière d’habiter le monde, de lui donner des contours, de le rendre partageable.
Mais bientôt, l’envie d’ouvrir le cadre s’impose. Non plus seulement publier, mais composer un écosystème où les œuvres circulent, s’entendent, se voient, se transmettent.
C’est la naissance du groupe éditorial Dèstrom-Corp, conçu comme une colonne vertébrale : des labels qui dialoguent, des studios qui donnent souffle aux livres, des équipes qui savent autant écouter que fabriquer.
À travers Dèstrom-Corp, Rama façonne un univers où la culture n’est pas un silo mais une passerelle : entre écrit et audio, entre création et diffusion, entre territoires et publics.
En 2025, une étape supplémentaire s’impose. Pour agir avec plus d’ampleur, pour tenir ensemble des métiers et des horizons qui se répondent, Rama crée Anacréon — une holding au sens le plus simple et le plus exigeant du terme : une maison-mère qui protège, oriente et met en relation.
Anacréon n’est pas un étendard ; c’est une charnière.
Elle relie les labels culturels, l’édition imprimée et numérique, la production de livres audio et de fictions sonores, les projets de tourisme culturel, et l’économie très concrète des lieux qui accueillent, forment, enregistrent, diffusent.
Ce mouvement s’enracine sur deux rives : Paris et le Canada —, non comme deux adresses mais comme deux respirations.
En France, l’atelier de direction éditoriale et les partenaires studios ; au Canada, des dialogues vivants avec autrices, auteurs, interprètes, et des communautés qui nourrissent une francophonie plurielle.
Deux rives pour un même cap : faire exister des œuvres qui tiennent au cœur et dans le temps.
Parce que l’accès est une condition de la dignité culturelle, l’accessibilité n’est pas chez Anacréon un supplément d’âme : c’est une matrice.
Les livres audio pensent la diction, les silences, la dynamique ; les publications numériques respectent la sémantique, l’EPUB accessible, les descriptions d’images et les contrastes ; les sites et services se conçoivent pour être lisibles aux lecteurs d’écran et praticables au clavier.
Ce souci du juste usage n’est pas qu’une méthode : c’est une éthique, forgée dans l’expérience et portée au quotidien.
Anacréon s’engage également au sein du consortium Monarch-Legacy, aux côtés d’acteurs qui croient que le tourisme culturel peut être une façon de rendre aux territoires ce qu’ils nous offrent : récits, savoirs, hospitalité.
La holding met en mouvement ses savoir-faire : audioguides qui donnent voix aux lieux, collecte de mémoires locales avec historiens et anciens, dispositifs sobres qui transforment la visite en rencontre.
Les projets dits « économie réelle » trouvent ici leur place : une agriculture plus respectueuse des sols et des communautés, des espaces d’accueil et de formation pensés pour servir les usages avant les apparences.
Ainsi va Anacréon : peu de bruit, beaucoup de tenue.
Une organisation qui préfère la netteté des processus à la grandiloquence des discours ; qui avance « à pas mesurés », comme on avance avec des œuvres et des personnes.
Ce que la holding vise n’est pas l’empilement : c’est l’harmonie.
Harmoniser des métiers, des talents, des rythmes ; faire dialoguer les maisons et laisser, à chaque fois, la place à ce qui demeure.
Tout part d’un geste simple : rendre possible.
Rendre possible qu’un livre devienne voix. Qu’une voix révèle un paysage. Qu’un paysage rappelle une mémoire. Et que cette mémoire, à son tour, élève.